Elle est revenue. Sans m’en apercevoir, elle a ouvert la porte, est entrée dans ma maison, s’est assise dans le living, face à moi. Avant que je ne lui dise quoi que ce soit, elle m’a fait un arrogant signe de la main, m’ordonnant d’attendre de parler. Elle s’est ensuite levée et s’est dirigée vers la cuisine, a ouvert le frigo,et pris une boisson. Du coca, à sept heures du matin. Quelle éducation !
Revenue dans le living, elle a prétendu découvrir un paquet de cigarettes dans mon armoire. Elle m’a lancé un regard choqué, mais c’était son paquet, je ne fume pas je le jure. Oh et puis pourquoi dois-je me justifier ? Quelle importance ? Et puis bon sang si je fume, est-ce que cela la regarde ? Respire un coup, me suis-je dite. Je l’ai regardé droit dans les yeux, je l’ai envoyé paître avec mon regard, inutile de laisser une petite taquinerie me nuire. J’ai de plus nobles batailles à préparer.
Elle s’est rassise dans le living, je t’en prie oui, fais comme chez toi, ne me salue surtout pas. Elle a allumé une cigarette et commencé à chantonner. Arrête de faire ta diva, éteins-moi cette cigarette pour commencer et dis-moi où tu étais passée. Depuis tout ce temps.
Elle s’est levée, a tiré longuement sur sa cigarette, s’est approché de moi et a soufflé la fumée dans mon visage. Insolente ! J’avais envie de jurer mais je me suis tue. J’enverrai la note au département Self Control de ma personne.
Une jambe sur l’autre dans mon sofa, je sais Mwiza, j’ai vu que tu as un nouveau blue jeans et de nouvelles bottes Louboutin Imited Edition, ha. Déjà une deuxième cigarette. Doux Jésus, qu’elle fume trop cette enfant! Elle me fait tousser, m’énerve mais sait que je ne suis pas violente. Si je l’étais,…bon je ne le suis pas. Si je l’étais,…faut même pas imaginer ce que je ferais, non non, faut pas laisser la violence envahir mon imagination. Place à la paix, autant ne pas la gaspiller par ici.
Sans que je ne dise quoi que ce soit elle m’a tendu un stylo et m’a dit : « écris ». Exclusivement sur elle et sa vie désordonnée. Elle attendait que je m’y oppose, que je lui dise non, je n’écrirai pas sur toi, et ta vie abracadabrante, j’écrirai sur l’économie, la politique, la sociologie, l’épanouissement personnel. Je suis une personne sérieuse moi. Toi là, Mwiza, personne n’a envie de connaître les détails de ta vie chaotique. Mais j’ai changé, et elle ne le sait pas. Je suis plus aventurière, et plus terre à terre. Et puis j’avais envie de lui montrer que les larmes de crocodile qu’elle avait préparées pour me convaincre étaient inutiles. Pour la première fois, j’étais heureuse de prendre contrôle sur elle. Je l’ai regardé et j’ai dit, d’accord Mwiza, sur le ton le plus serein du monde. J’ai même rajouté un sourire, imaginez-vous.
Elle était furieuse, de me voir accepter sa demande aussi rapidement et surtout sans histoires. Elle aurait aimé se battre et s’endurcir avec moi. Mais non, ailleurs peut-être Mwiza, jamais avec moi. Elle avait mal de me voir libre de dire oui à l’aventure. Libre de porter des chaînes de l’écriture. Elle m’a crié ” J’t’aime pas Zaha”…Nous avons ensuite éclaté de rire, et passé la journée ensemble à refaire le monde, du moins ce qui en reste…
Mwiza croit dur et fort qu’elle est le nombril de l’univers, alors je pense qu’elle a fini par l’être. Elle est aussi un peu trop libre à mon goût. Elle pourrait donner un peu de sa liberté aux autres…Parfois même, elle s’offre le luxe de la gaspiller.Elle pense que je ne la connais pas. Je sais où elle était et ce qu’elle a fait, depuis tout ce temps.
Peut-être que je la juge un peu trop vite. Parce que…est-on jamais assez libre ?
Place à l’aventure en 2016 avec La Petite Chronique de Mwiza.
Meilleurs voeux!
Zaha Boo